Du 29 au 31 août 2024, le Laboratoire de la République a organisé, à Autun, sa première université d'été. Vous avez été plus de 600 à nous rejoindre et à participer à nos tables rondes. Vous trouverez dans cet article les Actes d'Autun qui permettront à ceux qui y ont participé d’avoir une modeste trace écrite de leurs échanges, et à ceux qui n’ont pu se joindre à nous d’avoir un aperçu de la dynamique initiée par le Laboratoire de la République en 2024 … et de préparer au mieux Autun 2025 !
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Comment dans ce monde tenté par la fragmentation et le radicalisme garder le cap de l’idée républicaine ? Réunis à Autun en Bourgogne du 29 au 31 août 2024 dans le cadre de la première Université d’été du Laboratoire de la République, quelque 600 participants – élus, hauts fonctionnaires, intellectuels, membres de la société civile, représentants syndicaux, décideurs économiques et simples citoyens - ont planché, autour de Jean-Michel Blanquer, ancien ministre de l’Éducation nationale, sur les défis d’aujourd’hui et de demain auxquels fait face le modèle républicain français.
Placée sous le signe de la jeunesse et de l’égalité des territoires, l’Université a été l’occasion d’aborder au travers de dix ateliers les grands enjeux auquel notre République est confrontée. Depuis la laïcité jusqu’aux défis environnementaux et sociaux, en passant par la construction européenne et le sens de la politique de défense de la France, cet ouvrage rassemble les présentations et analyses des personnalités qui ont conduit les discussions. Adressé aux décideurs comme aux simples citoyens, il vise à nourrir le débat public.
Les trois accords interprofessionnels conclus par les partenaires sociaux le 14 novembre 2024, dont un sur l’assurance chômage, montrent que la confiance du premier ministre Michel Barnier envers le dialogue social porte ses premiers fruits.
Néanmoins, cette réforme ne permettra pas d’éviter le véritable problème social qui est la hausse du nombre de demandeurs d’emploi qui se profile, ni de résorber les pénuries locales et sectorielles de main-d’œuvre qui subsistent.
La commission "République Sociale" chausse ses lunettes européennes et se demande si l'on peut s'inspirer du modèle allemand pour modifier structurellement notre approche du marché du travail.
Assurance chômage et emploi : réforme paramétrique ou structurelle ?
Les trois accords interprofessionnels conclus par les partenaires sociaux, dont un accord sur l’assurance chômage qui devrait dégager selon la presse des économies supérieures aux 400 millions d’euros demandés par les pouvoirs publics dans leur lettre de cadrage, sont à porter au crédit du Premier ministre et de la ministre du travail. La confiance de Michel Barnier envers le dialogue social a porté ses fruits et tranche avec l’approche des gouvernements précédents.
Une réforme paramétrique utile mais partielle
Cette nouvelle réforme paramétrique de l’assurance chômage (versement des allocations sur trente jours tous les mois, réduction des allocations des travailleurs transfrontaliers…) a une dimension principalement budgétaire. Elle n’est pas mince puisque les économies devraient, nous dit la presse, atteindre 1,7 milliards d’euros par an en régime de croisière.
Cette réforme ne devrait pas permettre, néanmoins, d’éviter le véritable problème social qui est la hausse du nombre de demandeurs d’emploi qui se profile, ni de résorber les pénuries locales et sectorielles de main-d’œuvre qui subsistent.
L’Allemagne, avec un taux de chômage de 3,5% en septembre 2024 contre 7,6% en France selon Eurostat et un taux d’emploi de 77,4% au deuxième trimestre 2024 contre 69% en France, offre l’exemple d’une meilleure efficacité dont nous gagnerions à nous inspirer. Outre des contrats plus flexibles (mini jobs) et davantage de temps partiel (30,2% de l’emploi contre 17,4% en France en 2023), trois ingrédients clé sont à la base des performances de notre voisin outre-rhin sur le front de l’emploi et du chômage. Comment peut-on s’en inspirer ?
Trois ingrédients dont s’inspirer
1) Focaliser l’accompagnement des chômeurs sur une reprise la plus rapide possible d’un emploi
Il faut d’abord tourner résolument l’accompagnement des chômeurs vers l’objectif d’une reprise la plus rapide possible d’un emploi et pas prioritairement, comme en France, vers l’accompagnement de leurs projets, parfois peu réalistes. Cela n’empêche pas de mettre en œuvre en parallèle des programmes de reconversion et d’évolution professionnelle pour les demandeurs d’emploi qui ont repris un travail et qui souhaiteraient changer de métiers.
En contrepartie d’allocations chômage globalement plus favorables que dans beaucoup d’autres pays de l’Union européenne, France Travail et l’Unedic pourraient aussi exiger, comme en Allemagne, mais également dans d’autres pays européens, des démarches plus actives de la part des chômeurs et des contraintes plus fortes : des durées de transport plus élevées dans les zones, notamment urbaines, où existe un système fonctionnel de transports en commun, un système d’information électronique qui retrace en continu la recherche active d’emploi, des sanctions plus nombreuses et systématiques mais plus proportionnées en cas de recherche insuffisante ou de refus d’un emploi…
2) Cibler les chômeurs ayant une faible ancienneté
Ensuite, il faut avoir pour objectif prioritaire de trouver un emploi aux nouveaux chômeurs, voire aux salariés sur le point de perdre le leur, et pas, comme en France, de réinsérer les personnes les plus éloignées du marché du travail. Faire comme en Allemagne représenterait une inflexion importante de la réforme de France Travail. Elle est néanmoins justifiée. L’objectif de réinsertion des demandeurs d’emploi de très longue durée et des bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) est louable mais c’est un choix trop coûteux dans le contexte actuel des finances sociales et du marché de l’emploi. Il va exiger beaucoup d’efforts et d’argent public pour des résultats qui seront par construction médiocres.
Au contraire, se focaliser sur le retour à l’emploi rapide des demandeurs d’emploi de moins d’un an, comme le font les Allemands, permettrait de faire des économies substantielles sur les allocations chômage qui leur sont versées, pour un montant certainement supérieur à 400 millions d’euros par an, et de répondre aussi hic et nunc aux besoins de main-d’œuvre des entreprises.
3) Refonder la gouvernance de l’assurance chômage et du service public de l’emploi
Enfin, il faut donner aux partenaires sociaux l’entière responsabilité de l’assurance chômage et de l’accompagnement des chômeurs de moins d’un an d’ancienneté. Transposée en France, cette réforme reviendrait à ce que les agences locales de France Travail agissent désormais pour le compte de l’Unedic, à la main des partenaires sociaux, qui gèrerait entièrement et de façon indépendante l’indemnisation et l’accompagnement des chômeurs récents.
L’Etat fixerait seul les paramètres de l’assurance chômage des chômeurs de plus d’un an d’ancienneté jugés aptes, selon un critère médical clair comme en Allemagne, de revenir sur le marché de l’emploi. Et ce seraient, dans le cadre d’une gouvernance décentralisée et partenariale, des structures communes à France Travail et aux collectivités territoriales (les villes, les intercommunalités voire les départements selon les cas) qui seraient en charge de leur accueil et de leur accompagnement. L’accompagnement social des personnes trop éloignées du marché de l’emploi et jugées inaptes à retrouver un emploi resterait géré par les départements.
Comme l’exemple de l’Allemagne et d’autres voisins européens le montre, l’amélioration du fonctionnement du marché du travail français, l’augmentation du taux d’emploi et la baisse du chômage dans notre pays passent par des changements structurels et non pas uniquement paramétriques. Mais ces changements exigent une capacité de rapprochement des points de vue, de dialogue social et de réforme qui ne se décrète pas et ne peut que s’inscrire dans le temps long.
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L’équilibre des territoires est un enjeu majeur pour renforcer l’unité et la cohésion nationale en France. À travers un dialogue riche et éclairant, Benjamin Morel, maître de conférences en droit public, secrétaire général de l’association, responsable de la commission République indivisible et Vincent Chauvet, maire d’Autun, confrontent leurs perspectives. Ensemble, ils explorent les défis rencontrés par les petites villes et les zones rurales.
Benjamin Morel, maître de conférences en droit public, secrétaire général de l'association, et responsable de la commission "République indivisible", dialogue avec Vincent Chauvet, maire d’Autun, une sous-préfecture de 13 000 habitants située en Saône-et-Loire.
Leur échange porte sur le thème de l'équilibre des territoires en France, un enjeu clé pour garantir l'unité et la cohésion nationale. Ils abordent les défis spécifiques auxquels font face les petites villes et les zones rurales.
Avec des perspectives complémentaires, Benjamin Morel met en lumière les enjeux juridiques et politiques liés à l’organisation territoriale, tandis que Vincent Chauvet partage son expérience concrète de terrain en tant que maire d’Autun. Ensemble, ils proposent des pistes de réflexion pour construire une République plus équilibrée.
https://youtu.be/E5ouzI_oNPc
En cette Journée mondiale de la santé mentale, Thierry Taboy et Marie-Victoire Chopin abordent les défis psychologiques auxquels sont confrontés les jeunes aujourd'hui. Depuis deux ans, Marie-Victoire Chopin, docteur en psychologie, DMU Neurosciences, APHP Sorbonne Université, et Thierry Taboy, coordinateur de la commission technologique du Laboratoire de la République, mènent un combat contre les troubles identitaires exacerbés par le numérique.
Devant le miroir du matin, nous nous dévisageons, scrutant celui ou celle que nous sommes. Et nous choisissons celui ou celle que nous allons être. De la tenue que nous allons enfiler aux rôles que nous allons jouer en privé ou en public, tout relève d’un jeu paradoxal entre notre besoin de singularité et notre désir de reconnaissance. La sortie du paradoxe semble impossible: il faut que chacun de nos gestes traduise notre individualité, tout en la faisant accepter par les autres. Dans ces conditions, un avatar devient une version épurée de nous, répondant à ce paradoxe.
Le concept de singularité, comme présenté par le sociologue Andreas Reckwitz, met en lumière la quête moderne de l'originalité et de l'unicité. Cette recherche de singularité affecte de nombreux aspects de la vie quotidienne, de la nourriture que nous mangeons à nos choix personnels. Reckwitz souligne que cette logique de particularité peut entraîner une crise de l'universalité.
Qui apparaît dans ce reflet du miroir – l'explorateur des mondes virtuels, le professionnel impeccable, le séducteur des réseaux de rencontre ? Aujourd'hui, notre soi authentique semble fragmenté, dilué dans une marée d'avatars et de profils. Chaque compte social est une image déformée de nous ; mais comment ces reflets numériques façonnent-ils notre sentiment d'identité profonde ?
La construction de l'identité personnelle, le jeu comme constante.
Notre identité se façonne dès la tendre enfance, à travers les jeux et les rôles que nous incarnons en imitant le monde des adultes. Selon Winnicott, c'est dans le jeu que nous sommes véritablement libres de nous manifester. Erikson, lui, identifie l'identité comme un sentier parsemé de crises, chaque étape étant essentielle dans notre développement. Alors que nous grandissons, ces jeux évoluent, s'entrelacent avec les outils digitaux pour former de nouveaux masques, de nouvelles identités.
L'identité est un concept complexe qui englobe à la fois des aspects objectifs et subjectifs. Objectivement, chaque individu est unique sur le plan génétique. Subjectivement, l'identité renvoie à la conscience de son individualité, de sa singularité et à une continuité dans le temps. Cet aspect est important non seulement pour le sujet lui-même mais aussi pour son entourage, qui attend cohérence et constance dans les comportements de l'individu.L'identité comprend diverses composantes telles que l'identité perçue par soi-même et par autrui, le sentiment de soi, l'image et la représentation de soi, l'estime de soi, la continuité personnelle, le soi intime versus le soi social, et le soi idéal versus le soi réel. Ces différents aspects contribuent à former une notion complexe d'identité. Ainsi, l‘identité subjective est profondément sociale. Le besoin de reconnaissance est souvent lié à des personnes ou des groupes de référence importants pour nous, où être reconnu signifie être apprécié et aimé. Cette reconnaissance est un facteur clé dans l'estime de soi et l'existence perçue. Le perfectionnisme est parfois une conséquence de ce besoin de reconnaissance et de validation par ces figures significatives.
Comment rester soi au milieu de cette métamorphose ? Rogers interrogeait déjà l'influence terrifiante de voir nos multiples facettes se projeter dans un monde où la perception de soi s'en trouve fragmentée.
Identités et numérique
Sur les scènes des réseaux sociaux, nos existences se déclinent en multiples versions. Instagram immortalise nos moments les plus photogéniques, LinkedIn expose nos ambitions, et les sites de rencontre esquissent des séducteurs idéalisés. Les jeux multijoueurs nous permettent de devenir de vrais transformistes en relation avec nos projections de notre moi profond (genre, culture, langue..). La simplicité enfantine qui nous offre de créer nos propres « deepfakes» personnels élève cette curation de soi à un niveau vertigineux, brouillant la ligne entre réalité et représentation, authenticité et artifice. Sherry Turkle nous rappelait déjà en 2011 que ces technologies ne se limitent pas à être des moyens d'expression – elles modèlent notre identité même.
Une vulnérabilité augmentée
Pour celles et ceux déjà aux prises avec des troubles psychologiques, les espaces numériques et sociaux ne sont pas de simples distractions. Ils peuvent agir comme des révélateurs, intensifiant les symptômes de mal-être. John Suler a discuté de l'effet d'anonymat en ligne et comment le manque de repères tangibles peut mener à une altération de l'identité. Dans un univers où l’enveloppe physique s’efface au profit de l’avatar, il est essentiel d'offrir un accompagnement adapté, en particulier aux plus jeunes d’entre-nous.L'éducation numérique, la sensibilisation aux risques et un dialogue ouvert sur la santé mentale doivent être des priorités pour protéger et fortifier notre jeunesse face à ces défis modernes.
Fragmentation de l'identité et risques psychologiques
La diversité de nos "mois" numériques peut être source de confusion et de conflit interne. Elias Aboujaoude souligne la dangerosité de nos identités virtuelles séparées de notre réalité, qui peuvent mener à des affections psychologiques graves. Jean Twenge va plus loin en indiquant l'impact délétère de ce phénomène sur les adolescents, traduit par une augmentation de la dépression et de l'anxiété. Brené Brown, quant à elle, nous oriente vers l'authenticité et le courage d'être nous-mêmes, dans un monde qui met souvent l'accent sur la perfection. Et face à la dissonance entre le réel et le virtuel, Katherine Hayles questionnait dès 1999 la formation d'une schizophrénie posthumaine, où l'intégrité de l'individu est mise à rude épreuve).
Dans le mirage numérique, nous sommes invités à renouer avec l'individu qui se dissimule derrière les avatars – celui qui respire, rêve, et aime réellement. Il est temps de se poser des questions essentielles sur notre identité et de la cultiver avec sincérité.Sommes-nous les auteurs de notre existence ou les acteurs d'un rôle scripté par d'autres ?
Plaidoyer pour l'intégrité, nous lançons un appel à vivre authentiquement. Cherchons à établir notre identité sur des bases solides, stables, et véritablement nôtres. Résistons à la co-modification de soi et embrassons notre vraie nature dans ce théâtre d'avatars. Au fond, la personne que nous rencontrons dans le miroir sans fard, sans artifices, mérite notre attention la plus authentique et notre affection la plus vraie. Puissions nous tous vivre en concordance avec notre âme, dans un univers constamment remis en question par la technologie et les apparences.
À l’occasion des Jeux olympiques, le Laboratoire de la République interroge certains de ses membres les plus jeunes. Swann, Layal et Charlotte partagent avec nous leurs opinions, observations et comparaisons entre les valeurs olympiques et celles républicaines. Ils font part de leur intérêt pour les Jeux olympiques de Paris qui commenceront le 26 juillet.
Le Laboratoire de la République : Participerez-vous ou assisterez-vous aux JO de 2024 ? Quel est votre intérêt pour cet événement ?
Swann : Honnêtement, je suis partagé. D'un côté, je pense que c’est une occasion unique de vivre un moment convivial dans notre capitale, et nous devrions nous réjouir de cette chance. Toutefois, les contraintes financières et organisationnelles limitent mon intérêt dans ces jeux. Il aurait été appréciable d'avoir plus d'options pour obtenir des places gratuites ou à prix réduits pour la population française.
Charlotte : Il y a peut-être une spécificité française là-dedans, mais j'ai entendu très peu de gens s'enthousiasmer à l'idée d'accueillir les JO, un événement rare à Paris. Cela pourrait être révélateur des valeurs de fraternité et d'unité que le sport est censé promouvoir. À part la Coupe du monde de football, qui est le dernier grand événement sportif où l'on voyait des drapeaux français et où les gens chantaient la Marseillaise, il n'y a plus grand-chose qui fédère autant. Aujourd'hui, les gens sont surtout mécontents à l'idée des JO à cause des coûts pour les contribuables.
Layal : En France, nous sommes beaucoup moins unis autour du sport que les pays anglo-saxons, comme les États-Unis. Par exemple, pendant la pandémie de COVID, une équipe de hockey a pu voyager pour participer à un championnat, et tout le pays trouvait cela positif. Si cela s'était passé en France, nous aurions plutôt réagi en nous plaignant que les sportifs puissent voyager alors que nous ne le pouvons pas. Ce n'est plus vraiment dans notre culture de nous rassembler autour du sport, contrairement à ces pays.
Swann : Teddy Riner avait souligné que le sport est en France relégué au second plan par rapport à d'autres pays. Pour moi, cela relève aussi des choix internationaux du Comité International Olympique. Les derniers JO ont été tellement politisés, avec une volonté de projeter une belle image, que cela a entraîné des crises financières en Grèce et au Brésil. Cela a un peu détourné l'image du côté sportif et de l'unité que les JO sont censés représenter.
Le Laboratoire de la République : Les valeurs olympiques et républicaines sont-elles liées ? En quoi se ressemblent-elles ?
Swann : Les trois valeurs de l’Olympisme sont l’excellence, l’amitié et le respect. Lorsqu'on pratique un sport en club, on réalise rapidement que malgré nos différences sociétales et culturelles, nous sommes unis derrière un même objectif. Cet objectif inclut non seulement la recherche de la victoire, mais aussi l'épanouissement personnel, l'entraide, la résilience et la capacité à se relever après une défaite. Même en cas de défaite, on peut partager un moment avec l'adversaire, ce qui nous renforce mutuellement et nous permet d'apprendre les uns des autres. C'est une expérience unique que l'on retrouve dans la pratique sportive. Ce qui est vraiment impressionnant avec les JO, c'est qu'en regardant les tribunes, on voit des drapeaux de tous les pays. Ce n'est pas seulement une compétition entre plusieurs équipes, mais un mélange de tous les pays, avec des supporters qui viennent représenter leurs couleurs et partager un moment sans qu'il n’y ait réellement de vainqueur ou de perdant à la fin. C'est un véritable moment de partage où nous sommes tous au même niveau, tous égaux.
Layal : L'égalité entre hommes et femmes parmi les athlètes est un aspect particulièrement mis en avant cette année. Cette parité exacte montre un engagement fort pour l'égalité des genres dans le sport, ce qui est un véritable progrès vers une représentation équitable dans les JO. De plus, le Comité d'Organisation (COJO) a pris des mesures significatives pour sensibiliser les JO au développement durable. Ils ont mis en place des initiatives visant à rendre les Jeux plus durables sur le plan environnemental et social. Cela inclut la réduction de l'empreinte carbone, la gestion responsable des ressources et la promotion de pratiques durables dans tous les aspects de l'événement, depuis la construction des infrastructures jusqu'à la gestion des déchets et l'utilisation des transports. En intégrant ces valeurs d'égalité et de durabilité, les JO de cette année jouent un rôle important non seulement dans la promotion du sport de haut niveau, mais aussi dans la promotion des valeurs républicaines telles que l'égalité, la solidarité et la responsabilité environnementale.
Charlotte : Le sport a toujours été une occasion de refléter également un idéal politique que l'on souhaite promouvoir ou communiquer, de la part des autorités à travers les choix qui sont faits. Cela reflète une certaine tendance politique ou un climat politique, même dans les choix relatifs à la cérémonie d'ouverture, la sélection des chanteurs, et d'autres décisions qui expriment une volonté gouvernementale. Les JO sont aussi un moyen d'expression et de tribune pour certains athlètes, leur offrant visibilité et une plateforme pour faire reconnaître leur sport. En France notamment, il y a eu récemment des exemples d'athlètes français qui ont saisi l'occasion des JO pour s'exprimer sur des sujets importants. Les Jeux paralympiques qui suivent bénéficient indirectement de cette visibilité, car il n'y aurait probablement pas d'autre compétition internationale qui réunirait autant de sponsors et de moyens pour mettre en valeur les athlètes. Les JO ne sont pas seulement une compétition sportive, mais aussi une plateforme culturelle et politique qui peut avoir un impact significatif dans la société.
Le Laboratoire de la République : Comment ces JO 2024 en France peuvent-elles promouvoir les valeurs républicaines ?
Swann : C'est vrai que l'ambiance et le climat autour des JO jouent énormément sur l'image renvoyée par les pays participants en matière de respect sportif. Je me souviens qu'aux JO de Rio en 2016, l'athlète français Renaud Lavillenie avait été hué dans les tribunes.
Charlotte : Cela renvoie immédiatement une mauvaise image du public brésilien. Les JO sont une plateforme mondiale qui peut entretenir certains stéréotypes, notamment sur les Français qui sont parfois vus comme de mauvais joueurs ou de mauvais perdants. Par exemple, il y a eu cet incident avec le tennisman belge qui a essuyé des crachats de la part d’une partie du public après avoir battu un joueur français à Roland-Garros. Les valeurs républicaines prônent le respect et la fraternité, et c'est justement l'occasion de montrer ces valeurs.
Layal : Les JO peuvent promouvoir l’engagement citoyen pour aider dans la tâche difficile d’organisation. J'ai postulé pour être bénévole mais je n'ai pas été retenue. Je voulais vraiment m'engager. Je pense que quand on est impliqué dans un projet, c'est une expérience unique. Contribuer à l'organisation des JO est quelque chose que l'on ne fait pas tous les jours dans sa vie. Les Jeux Olympiques sont l'occasion de rassembler les citoyens du monde entier au-delà de leurs nationalités.
Swann Riché est étudiant en Master 1 Droit privé général à Paris-Panthéon-Assas, ancien membre du comité directeur de l'association sportive d'Assas.
Layal Pages est étudiante en Master 1 Droit international à Paris 1 Panthéon-Sorbonne.
Charlotte Boutheroüe Desmarais est étudiante en Master 1 à l’ESCP.
À l’occasion de la Journée mondiale de l’environnement, le Laboratoire de la République interroge certains de ses membres les plus jeunes. Babette, Foucauld et Thomas partagent avec nous leurs opinions et leurs perspectives sur les enjeux environnementaux actuels. Cette année, la campagne de la Journée mondiale de l'environnement se concentre sur la restauration des terres, la désertification et la résilience à la sécheresse.
Le Laboratoire de la République : Quelles sont les principales menaces environnementales auxquelles notre planète fait face aujourd’hui ?
Babette : En premier lieu, je mettrais en avant la crise climatique et le réchauffement global. J'envisage cette situation de manière alarmiste. Pour moi, la crise climatique est la principale menace, car le climat est le préalable indispensable à toute vie, humaine, végétale, animale. Mais il ne faut pas oublier la crise de la biodiversité et la crise de l'eau, dont l’ampleur et l’impact sont aussi inquiétants. L’ensemble de ces crises rend nécessaire la transition écologique. En parallèle, il est crucial d'agir sur la pollution de l'air, cause et conséquence du réchauffement climatique, car ses conséquences sanitaires sont déjà visibles à très court terme. La pollution de l'air est un problème sérieux, particulièrement en région parisienne, mais aussi dans le reste de la France. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, l'air est pollué même dans des zones qui semblent préservées : il s’agit d’un enjeu majeur de santé publique. Personnellement, j'ai développé de l'asthme à cause de la qualité de l'air. En France, la pollution de l'air cause 40 000 décès par an et rien que pour ça, il est crucial d’agir à l’échelle nationale même si la France n’est pas le pays le plus émetteur.
Foucauld : Oui, je suis d'accord avec Babette, et j'adjoindrai également la perte de biodiversité. L'eau est, bien entendu, un autre enjeu majeur. J’ajouterai que l'homme est aussi une grande menace pour la planète.
Thomas : Il y a d'abord l'activité agricole, car le modèle agricole dominant actuel constitue une menace indéniable pour l'environnement. À cela s'ajoutent plusieurs autres facteurs. L'expansion urbaine, par exemple, est problématique. Le modèle actuel d'expansion des villes et de développement pavillonnaire contribue à l'artificialisation des sols, perturbant les cycles de l'eau, du carbone et de l'azote. En résumé, les pratiques agricoles, l'urbanisation, ainsi que les émissions de gaz à effet de serre liées aux industries et aux activités humaines, y compris la déforestation, posent de sérieux problèmes environnementaux.
Le Laboratoire de la République : Pensez-vous que les politiques nationales et européennes actuelles sur l'environnement sont suffisantes pour répondre aux défis écologiques ?
Babette : Je pense qu'on ne fait pas assez, bien que je sois pleinement consciente de l'ampleur de la tâche. Changer de modèles politique, économique, social, commercial, technologique, et industriel ne se fait pas en un claquement de doigts. Cela prend du temps, et nous sommes vraiment à un tournant crucial. Nous commençons peut-être à comprendre qu'il faut réformer certains aspects de notre modèle actuel. Cependant, en regardant ce que disent les scientifiques, il est clair que nous ne faisons pas assez et que nous risquons d’excéder les limites définies par l’accord de Paris. Cela dit, je reconnais que des efforts sont faits, et la France joue un rôle de leader au niveau international. J'essaie de me concentrer sur les faits concrets plutôt que sur les grandes idées, car même si elles sont inspirantes, leur mise en œuvre pratique est souvent difficile. Je suis pragmatique et préfère observer les progrès réalisés plutôt que de me focaliser uniquement sur ce qui devrait être fait, bien que ce cadre soit important à garder en tête. À l'échelle européenne, la France est également un moteur dans cette dynamique. Nous verdissons considérablement nos stratégies diplomatiques, ce qui est à mon avis très positif.
Foucauld : Il y a un élément essentiel à considérer : une politique nationale seule ne peut pas suffire à lutter contre le réchauffement climatique. Des politiques à grande échelle, que ce soit au niveau européen ou international, sont indispensables. Ensuite, il est incontournable d'adopter des mesures politiques pour gérer la raréfaction de l'eau, la réduction des émissions de gaz à effet de serre, le modèle agricole global, et la perte de biodiversité. Il est donc nécessaire de passer par des actions politiques globales pour agir efficacement contre le réchauffement climatique. Le problème est que plus il y a d'acteurs impliqués, plus il est difficile de parvenir à un consensus, car chaque pays a ses propres intérêts à préserver et ses propres activités à maintenir. La France, par exemple, étant un pays largement développé, peut se permettre de se poser ces questions, contrairement à des pays en voie de développement qui ont des priorités différentes, comme leur propre croissance économique avant les considérations écologiques. C'est une dynamique souvent observée lors des COP et c'est également le principal obstacle des accords de Paris : certains pays respectent ces accords, tandis que d'autres ne le font pas, chacun ayant ses propres intérêts à défendre.
Thomas : Il est essentiel d'avoir une approche globale pour lutter contre le réchauffement climatique, car chaque pays n'avance pas au même rythme. En France, de nombreuses actions sont mises en place, comme la loi Climat et Résilience visant la zéro artificialisation nette des sols. Cependant, cette loi ne résout pas entièrement les problèmes liés à l'expansion urbaine et aux maisons individuelles. En Europe, de nombreuses normes environnementales sont établies avec le Pacte Vert. La PAC, bien qu'initialement non axée sur l'environnement, inclut désormais des objectifs de verdissement. Cependant, ces derniers sont insuffisants pour encourager une transition ambitieuse des pratiques agricoles. À l'échelle mondiale, il est difficile de parvenir à un consensus global, mais des progrès notables sont réalisés. Par exemple, les pays du Moyen-Orient, autrefois réticents, s'engagent désormais dans des accords internationaux. À la COP28, les signataires ont promis de tripler la capacité d'énergie renouvelable d’ici 2030, un engagement significatif. Ces accords permettent également aux ONG d'attaquer les États qui ne respectent pas leurs engagements. Il est crucial de reconnaître ces avancées et de voir le verre à moitié plein, car les progrès, bien que lents, sont exponentiels et donneront des résultats positifs à long terme.
Le Laboratoire de la République : Avez-vous déjà participé à des initiatives ou des projets visant à protéger l'environnement, et quels gestes écologiques pratiquez-vous au quotidien pour réduire votre empreinte carbone ?
Babette : Je ne suis pas engagée dans des associations, mais j'ai entrepris des démarches personnelles, petit à petit. Il existe de nombreux leviers pour réduire son empreinte carbone, et je suis persuadée que chacun peut identifier les comportements durables qui sont le moins coûteux (en temps, en argent, en efforts) pour lui. Mes efforts personnels se concentrent sur la réduction des déchets. Beaucoup d’alternatives durables aux objets à usage unique peuvent être utilisées rapidement et facilement : souvent, elles sont moins chères et similaires sur le plan pratique. Je ne calcule pas mon empreinte carbone précisément, mais j'essaie d'adopter un mode de vie plus durable, de faire des petites choses à mon échelle. Par exemple, j'ai réduit ma consommation de viande sans l'éliminer totalement, je fais attention à ma consommation d’eau. J'essaie aussi de convaincre mes proches d'adopter des gestes faciles à mettre en place. Je pense que nous avons besoin de politiques publiques et de mesures facilitatrices. Je suis vraiment contre l'idée de faire peser toute la responsabilité écologique sur le citoyen lambda. Quand on nous dit qu'il faudrait limiter nos voyages en avion, je dis non, car l'ouverture au monde est cruciale. Et il est exclu d’imposer cette contrainte aux individus et pas aux énormes industries dont on ne compte pas les bateaux et avions en transit. Il faut une réforme des modèles industriels et économiques, peut-être grâce à un marché des quotas carbone plus ambitieux.
Foucauld : Je n'ai jamais participé à une manifestation pour le climat non plus. Il y a une différence générationnelle : ceux qui participent à ces manifestations sont souvent plus jeunes. Moi, j'étais déjà en études supérieures quand cela a commencé, et ce n'était pas une activité courante, surtout en école de management. C'est un effet générationnel.
Thomas : Je n'ai jamais participé aux marches pour le climat, mais fais des efforts pour trier mes déchets par exemple. Je continue à manger de la viande, mais de moins en moins, conformément aux recommandations sanitaires. Je trouve toujours aberrant d'utiliser des bouteilles d'eau en plastique. Je minimise ma consommation d'eau lorsque je prends une douche et cuisine, c’est un sujet très important. Pour mes déplacements, je maximise le train. Il est important de savoir que lors de la crise de la COVID-19, les émissions de CO2 mondiales ont fortement diminué, induisant une baisse de 7% des émissions en 2020. Cela signifie que la plupart des émissions de CO2 sont liées à un défi plus grand, et que nous devons prendre de plus forts engagements pour être à la hauteur.
Foucauld : Je te rejoins sur ce point. Je perçois une réelle attente de progrès de la part de cette génération, combinée à une incompréhension de la complexité du fonctionnement du monde. C'est un schéma commun à toutes les générations plus jeunes, où il y a souvent une lutte initiale suivie par la réalisation que le monde est bien plus complexe qu'on ne le pensait. En ce qui concerne les négociations climatiques internationales, je pense qu'il est important de ne pas considérer le verre comme à moitié vide. Les négociations climatiques ont leur importance, même si elles ne progressent pas aussi vite que certains le souhaiteraient. Nous ne pouvons pas ignorer des pays comme les Émirats arabes unis ou l'Arabie saoudite, même s'ils sont des gros émetteurs de CO2, car ce sont aussi des acteurs importants dans la transition vers les énergies renouvelables. Une incompréhension fondamentale réside dans le fossé entre la volonté politique écologique et la réalité vécue par les citoyens. La crise des Gilets jaunes en est un exemple frappant. Certaines mesures écologiques ont un impact disproportionné sur des populations qui utilisent leur voiture par nécessité pour se rendre au travail. Il y a aussi une résistance à la densification urbaine, même si cela pourrait être une solution pour réduire l'artificialisation des sols. En somme, il existe un écart entre les aspirations écologiques et la réalité quotidienne des gens, qui souvent privilégient leur confort immédiat sans toujours considérer les implications à long terme sur l'environnement.
Babette Depanian est étudiante en Master 2 Affaires publiques à Science Po Paris.
Foucauld Kneuss est chargé de mission dans l’enseignement supérieur.
Thomas Jay est étudiant en 1ère année de cursus ingénieur à AgroParisTech.
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