Rubrique : Défi géopolitique

La voix de la jeunesse : quels défis et quelles représentations de l’Union européenne ?

par L'équipe du Lab' le 23 avril 2024 trois jeunes du Laboratoire de la République pour des questions européennes
Dans le cadre des élections européennes, le Laboratoire de la République interroge certains de ses membres les plus jeunes pour recueillir leur vision de l'Union européenne (UE), les défis qu'elle doit relever et leurs attentes vis-à-vis des prochaines élections. Dans cet entretien croisé, Emma, Carla et Théo partagent avec nous leurs opinions et leurs perspectives sur l'avenir de l'Union européenne.
Le Laboratoire de la République : Que représente l’Union européenne, pour vous, en tant que jeunes citoyens européens ? Théo : Lorsque l'on évoque l'Europe, il est impossible de ne pas mentionner Erasmus pour les étudiants. Ce programme, parmi d'autres initiatives de l'Union européenne, se révèle particulièrement intéressant. Je pense aussi aux subventions accordées pour de multiples projets publics ou associatifs. Cela démontre que l'Union européenne constitue une ressource précieuse pour les États membres. Cependant, il est essentiel de reconnaître la montée de l'extrême droite, symbolisée par des figures telles que Viktor Orbán, qui suscite des inquiétudes quant à l'avenir de l'Union européenne. Carla : À la rentrée prochaine, je participerai à un programme Erasmus, et j'envisage la Suède comme destination. Je suis très enthousiaste à l'idée de perfectionner mon anglais tout en découvrant une nouvelle culture. C'est une opportunité unique qui pourrait ne pas se représenter. En discutant avec d'autres jeunes, même ceux qui ne sont pas dans le domaine des sciences politiques, je constate un manque d'informations sur les avantages concrets de l'Union européenne en dehors du programme Erasmus. Bien sûr, nous savons qu'elle favorise le progrès économique et social à l'échelle nationale, ainsi que les alliances et le libre-échange. Cependant, en tant que jeunes, nous ne sommes pas suffisamment informés sur les bénéfices tangibles de l'UE, ce qui peut nous décourager de nous impliquer, par exemple, dans le processus électoral. Nous percevons surtout l'Union européenne comme une grande entité technocratique, sans réellement saisir ses bienfaits au quotidien. L'accès à la connaissance de l'Union européenne est limité aux parcours académiques spécifiques tels que la science politique, le droit, les relations internationales, voire les cursus universitaires spécialisés dans le domaine. Cependant, au niveau du collège, du lycée et dans d'autres filières, il n'existe pas de cours ou de formations sur le fonctionnement de l'Union européenne. Dans les cours d'éducation morale et civique, il faut renforcer l'enseignement sur ce sujet, en particulier en expliquant le fonctionnement des institutions européennes, leur utilité et ce qu'elles ont déjà accompli. Cela aiderait les élèves à envisager leur potentiel futur rôle. En outre, à court terme, je pense qu'il serait bénéfique de trouver des personnalités, telles que des porte-parole, influenceurs ou youtubeurs, auxquelles les jeunes pourraient s'identifier. Emma : Pour moi, l'Union européenne représente une plateforme de coopération politique, économique, et géopolitique, avec un accent particulier sur la garantie de sécurité et la coopération dans divers domaines, tels que le changement climatique. Bien que l'UE puisse parfois imposer des lois uniformes sans tenir compte des spécificités nationales, je considère que ses impacts sont généralement positifs, favorisant le changement collectif. En ce qui concerne la résolution de conflits et le changement climatique, je crois fermement que ces problèmes doivent être traités collectivement au niveau européen, étant donné leur nature mondiale. L'UE peut jouer un rôle crucial dans des domaines tels que la défense et la diplomatie, renforçant ainsi son influence sur la scène mondiale. Concernant le changement climatique, je soutiens l'idée que l'UE devrait prendre des mesures préventives, en encourageant également les pays moins développés à s'engager dans des initiatives collectives. Cependant, il est essentiel de maintenir l'identité propre à chaque gouvernement au sein d'une Europe des nations, où les décisions partagées n'exercent pas de domination, mais ont tout de même un impact significatif sur la vie quotidienne et la gouvernance nationale. Le Laboratoire de la République : Quels défis doit-elle surmonter aujourd’hui ? Carla : Selon moi, le principal défi actuel est le coût de la vie. En tant qu'étudiante, je pense que nous sommes particulièrement concernés par cette question. C'est un défi crucial que l'Union européenne doit sérieusement considérer, comme cela a été récemment mis en évidence, notamment par les manifestations des agriculteurs. Théo : Effectivement, l'Union européenne exerce un rôle de régulateur sur le marché agricole. Cependant, je crois que certains enjeux restent méconnus, car il est essentiel de se rappeler que l'Union européenne repose avant tout sur ses institutions, notamment la Cour de justice. Cette institution est chargée d'interpréter et d'appliquer les traités, mais nous observons parfois un non-respect de ces traités de la part de certains États, entraînant des sanctions. Cela soulève des questions sur la santé démocratique de ces États, une problématique à laquelle l'Union européenne doit s'atteler. Carla : Je partage également cette opinion, et je viens de réaliser qu'il existe un enjeu crucial en matière de désinformation et d'intelligence artificielle, auquel l'Union européenne doit absolument s'attaquer. Emma : L’Union européenne doit maintenir une cohésion face à la montée des grandes puissances. Je pense qu’en forgeant une identité européenne solide, les défis géopolitiques allant des guerres au changement climatique peuvent être surmontés. Particulièrement étant donné que je vis en Angleterre, je sens que le fait de manifester contre le Brexit a renforcé l’identité européenne des jeunes. Récemment, j’ai également pris part à une discussion sur la jeunesse européenne, où plusieurs d’entre nous, Anglais, avons exprimé un certain déni face au Brexit. Nous avons souligné que notre identité européenne dépasse les décisions politiques prises par nos dirigeants, et que, peu importe le contexte politique et les orientations de nos gouvernements, nous sommes unis par des valeurs communes et des objectifs pour l’avenir. Le Laboratoire de la République : Quelle est votre opinion sur le sens des élections européennes pour l'avenir de l'Union européenne ? Considérez-vous qu'il est crucial de participer à ces élections ? Emma : Oui, je prévois d’aller voter, c’est certain. Même en tant qu’expatriée en Angleterre, je demeure française et donc européenne. Je pense qu’il est crucial de comprendre l’importance de cet enjeu. Pour être franche, les prévisions indiquent que le parti d’extrême droite français remportera ces élections, ce qui rend d’autant plus essentiel de se rendre aux urnes. Ce qui m’inquiète également, c’est la présidence du Conseil par le gouvernement hongrois, à partir de juillet 2024, reconnu pour son recul démocratique. Cela renforce l’urgence de voter et de soutenir des candidats partageant nos valeurs, ceux qui promouvront les résolutions économiques, sociales et écologiques que nous aspirons à voir mises en œuvre, plutôt que de laisser les partis extrémistes freiner notre progrès dans ces domaines. Il est nécessaire de créer une opposition afin que nos opinions soient représentées au Parlement européen, et que ces partis extrémistes ne dominent pas le paysage politique. Avec la possibilité que Trump soit réélu dans l’année à venir, il est crucial que nos représentants continuent à soutenir l’Ukraine en fournissant une aide militaire, économique et diplomatique. Il est donc primordial pour moi de m’assurer que les personnes pour lesquelles je vote maintiendrons cette position, d’autant plus que l’Union Européenne sera le seul véritable fournisseur d’aide à l'Ukraine dans le cas de la réélection de Trump. Théo : Il serait pertinent d'effectuer un sondage pour évaluer le niveau de connaissance des jeunes sur le fonctionnement de l'Union européenne, notamment en identifiant quelles institutions sont associées aux élections européennes. Il est clair qu'il existe une confusion, comme l'exemple récent où Emmanuel Macron a présidé le Conseil européen, qui n'est pas le Parlement européen. Il est donc crucial de clarifier les rôles de chaque acteur au sein de l'Union européenne. Étant donné que le Parlement européen prend des décisions, il est essentiel de voter. Il est préoccupant de constater que de nombreux populistes accèdent à des sièges au Parlement, ce qui est incohérent avec leurs discours et les attentes qui leur sont fixées en tant qu'élus. Il est nécessaire de rendre les connaissances sur l'UE plus accessibles, tout en veillant à ce que cette démarche ne se réduise pas à des confrontations politiques superficielles, mais englobe également des débats de fond. Carla : C'est la première fois que je voterai. Il est important de participer aux élections européennes, car le résultat de ces élections influencera également la politique nationale en France. Si nous laissons l'extrême droite remporter ces élections, cela ouvrirait la voie à leur victoire à la prochaine élection présidentielle. C'est une raison majeure pour laquelle il est primordial de voter, en plus des actions que peut entreprendre l'Union européenne. Emma Vidal de Saintignon est étudiante en Science politique et en relations internationales à l'University College de Londres. Elle est impliquée dans des associations diplomatiques et de relations internationales. Carla Diaz est inscrite en première année de licence de science politique et est également membre du journal Lill’bertin de l’Université de Lille. Théo Fouquer travaille pour la Fondation de la Catho de Lille, où il se charge de récolter des fonds (mécénat). Il a obtenu sa licence en sciences, technologie et santé, et il vient de commencer un master en sociologie, spécialisé en Économie Sociale et Solidaire, à l’Université Catholique de l’Ouest qui se situe à Angers, en parallèle d’un double cursus en école de commerce (ESSCA)

Défis et perspectives pour l’Union européenne : Analyse préélectorale

par Sylvain Kahn le 12 avril 2024 Parlement_européen_Strasbourg
À l'approche des élections européennes, le paysage politique de l'Union européenne (UE) se dessine avec des nuances et des défis qui captent l'attention. Dans cette entrevue avec Sylvain Kahn, professeur à Sciences Po, chercheur au Centre d’histoire de Sciences Po et spécialiste des enjeux européens, nous abordons les dynamiques préélectorales et les questions cruciales qui pèsent sur l'avenir de l'Europe. Alors que la montée de l'extrême droite et des eurosceptiques alimente les craintes d'un Parlement européen potentiellement bloqué, nous plongeons dans les défis démocratiques, la question de l'identité européenne et les enjeux géopolitiques qui façonnent le débat actuel. Sylvain Kahn offre des perspectives éclairantes sur les moyens de revitaliser l'engagement citoyen, la nécessité d'une défense européenne cohérente et les implications de l'UE dans la crise ukrainienne.
Le Laboratoire de la République : Lors des prochaines élections, nous nous attendons à une forte poussée de l’extrême droite et des eurosceptiques. Pensez-vous qu’il existe un danger d’un Parlement européen bloqué ou dominé par l’extrême droite pouvant entraîner des lourdes conséquences sur l’avenir de l’Europe ? Sylvain Kahn : La mobilisation, dans cette campagne, de la famille des droites radicales et extrêmes est en elle-même une nouveauté relative : on l’avait déjà constaté il y a cinq ans. Lors des décennies précédentes, les formations de cette famille cherchaient peu à structurer leur combat à l’échelle de l’Union européenne (UE), en raison de leurs nationalismes respectifs et de leur détestation de toute vie politique transfrontalière et supranationale. Ce faisant, les prochaines élections européennes cristallisent de façon nette des lignes de front qui, au fil des scrutins nationaux, ont bougé par petits bouts et petites touches depuis quinze ans. En effet, la famille des droites radicales et extrêmes – qu’elles soient nationalistes, ultraconservatrices ou antisystèmes –  se caractérise traditionnellement par son rejet de la construction européenne. Celui-ci se nourrit de la sacralisation de la souveraineté nationale (il ne peut y avoir qu’une souveraineté : celle de l’État-nation) et de la détestation des élites. Dans l’idéologie souverainiste de droite radicale et extrême, tous les acteurs de la vie politique dite “bruxelloise” sont ainsi frappés d’un double stigmate. Pourtant, l’actuelle campagne électorale européenne témoigne au grand jour d’une évolution majeure : les droites radicales et extrêmes ne font plus de l’Union européenne une entité à fuir ou à détruire, mais une ressource à utiliser de l'intérieur pour faire gagner du terrain à leurs valeurs et pour déployer leurs programmes politiques. Cette évolution est en fait plus notable et plus profonde que les spéculations sur un raz-de-marée électoral de cette famille qui, bien que guetté et annoncé dans de nombreux commentaires, ne se produira pas en mai 2024. En effet, pour qu’un raz de marée ait lieu, il faudrait que la dynamique électorale soit analogue dans au moins 18 ou 19 des 27 pays de l’UE. Or ce n’est jamais le cas. Les agrégateurs de sondages qui, comme europe elects font un travail remarquable en libre accès le confirment : dans les projections à 2 mois du scrutin, le groupe CRE, souverainiste, très conservateur et atlantiste, pourraient gagner 15 à 20 sièges ; le groupe ID, anciennement europhobe, xénophobe, antisystème et russophile autour de 10. Cette famille des droites radicales et extrêmes passerait de moins d’un cinquième des sièges à un petit quart de l’hémicycle européen. Et resterait divisée en deux groupes parlementaires bien spécifiques, celui qui travaille (CRE) et celui qui n’investit pas le travail parlementaire (ID). Le Laboratoire de la République : Quels sont, selon vous, les principaux défis que l'Union européenne doit relever pour mieux engager les citoyens européens dans le processus démocratique européen ? Existe-t-il une identité citoyenne commune européenne ? Sylvain Kahn : Si les pouvoirs du Parlement européen (PE) n’ont cessé de croître depuis 1979, année de sa première élection au suffrage universel, l’assemblée de Strasbourg demeure un parlement atypique si on le compare à l’idéal-type du parlement dans une démocratie représentative. En effet le PE, d’une part, n’a aucun pouvoir constituant : il est juridiquement exclu de la rédaction des traités qui instituent l’Union européenne ; celle-ci demeure de la compétence exclusive des États membres, dans le cadre d’une instance ad hoc, la conférence intergouvernementale (CIG).  D’autre part, le PE ne vote pas les recettes du budget de l’UE. Il s’agit pourtant, comme le dit l’adage no taxation without representation, de l’acte parlementaire par excellence en régime représentatif. C’est le parlement des États, dans sa formation la plus récurrente, à savoir le Conseil de l’Union européenne, et dans sa formation la plus emblématique, le Conseil européen, qui en décide seul. Cette modalité de décision est cohérente avec le fait que l’essentiel des recettes qui abondent le budget européen sont des contributions nationales prélevées sur les recettes fiscales des États membres, et que ces contributions sont donc votées par les représentations nationales lorsqu’elles votent le budget. Au vu de l’importance politique et symbolique prise par l’échelle européenne lorsqu’il s’agit de définir les politiques publiques ; considérant que le Parlement européen est co-législateur de ces politiques ; parce que ce parlement est élu au suffrage universel direct, et qu’il est non seulement logique mais important de ne pas dévaloriser l’exercice du suffrage universel et du droit de vote, il serait cohérent d’une part de donner au Parlement européen des prérogatives de co-législateur dans ces deux registres élémentaires du régime représentatif que sont la révision des Traités et la détermination du budget de l’UE ; et d’autre part de procéder à l’élection directe de deux sénateurs par État membre au Conseil ou de faire désigner ces deux membres par les parlements nationaux. La moins mauvaise façon d’engager les citoyens dans les politiques publiques européennes est d’en éloigner le plus possible les corporatismes étatiques qui ont tant de mal, fonctionnellement, à se représenter l’intérêt général européen. Ce ne sera pas suffisant, mais ce sera déjà beaucoup. Le Laboratoire de la République : La dissuasion et le renforcement du soutien à l'Ukraine seront des sujets clés lors de la campagne des élections européennes, ainsi que la question de la défense européenne face aux menaces géopolitiques. Pensez-vous que ce sujet appartient à l’Union européenne ? Sylvain Kahn : Comme européaniste, mon métier est de caractériser ce fait social global qu’est l’Union européenne et de comprendre la vie politique dans ce pays des Européens qu’est l’UE. Il s’agit de nommer cette réalité par-delà les stéréotypes et des avis tranchés et affectifs si fréquents sur l’UE. Cette invasion de l’Ukraine par la Russie est pour les Européens un ébranlement. Ils partagent près de 2300 km de frontières avec la Russie dont l’enclave de Kaliningrad qui, avec ses silos de missiles à têtes nucléaires, est située sur le territoire de l’UE, entre la Lituanie et  la Pologne, et en face de la Suède toute proche par la mer Baltique ; et près de 1300 km avec l’Ukraine qui était déjà un pays juridiquement associé à l’UE en 2022 ! Les Européens ont été amenés à prendre conscience de ce qu’ils ont construit ensemble face à l’altérité radicale, à leurs frontières, de la Russie. Celle-ci a déclenché une guerre pour arriver à ses fins, alors que les Européens, eux, ne se la font plus depuis trois générations et le lancement de la construction européenne en 1950, une bifurcation historique très profonde. La politique de l’UE de soutien à la défense de l’Ukraine est-elle approuvée par les citoyens européens ? Oui, c’est le cas, nous disent les enquêtes eurobaromètres réalisées tous les six mois dans toute l’UE comme les sondages réalisés pour différents think-tanks sur des échantillons plus réduits. D’ores et déjà, ce soutien net permet d’observer d’une part qu’il y a une opinion publique européenne et d’autre part qu’il y a une demande pour une politique régalienne à l’échelle de l’UE. Par conséquent, le sujet appartient de fait à l’UE, c’est-à-dire, rappelons-le, à une association d’États-nations s’étant mis d’accord pour mobiliser la supranationalité et la Commission européenne pour mettre en œuvre des politiques publiques qu’ils déploient ensemble sur leurs territoires. C’est compliqué car il y a autant d'industries de défense qu’il y a d’États-nations en Europe - ou presque. Les Européens soutiennent l’idée d’une défense européenne, mais on ne débat pas des modalités et des formes pratiques et concrètes que cette idée pourrait prendre. C’est un désir, ou une idée qui demeure abstraite. Ce que disent les analyses académiques, c’est qu’une défense européenne sera une politique européenne de l’industrie de défense ou ne sera pas. Publié en 2024 par l'auteur : L'Europe face à l'Ukraine, PUF "Dans la guerre d'Ukraine, l'Union européenne se révèle-t-elle comme l'Etat des Européens ?", in Claudia Sénik dir., Un monde en guerre, La Découverte, p. 117-135  “La guerre d’Ukraine révélateur du choix de l’UE pour l’influence contre la puissance”, L’Information géographique, vol.88, mars 2024, p.90-105. Publié en 2023 par l'auteur : "Should Europe disturb historians? On the importance of methodology and interdisciplinarity" , p. 124-133, First Published: 03 August 2023 , European law journal, Volume 28, Issue 4-6 ,  July-November 2022 "Les cultures territoriales de l'Union européenne et des Etats membres : une influence réciproque", in Sylvia Brunet dir., Population, temps, territoires, les évolutions territoriales entre résilience et innovation, Collection : Les dossiers des Annales de droit, Presses universitaires de Rouen et du Havre , juillet 2023, pp.131-159

Tribune : Fahimeh Robiolle évoque les élections législatives iraniennes du 1er mars

par Fahimeh Robiolle le 6 mars 2024 dessin_urne_drapeau_Iran
Fahimeh Robiolle, ancienne ingénieure franco-iranienne, enseigne la négociation et la gestion des conflits. Militante des droits des femmes en Afghanistan et en Iran, elle prône la paix et l'émancipation. Autrice de "Femme, Vie, Liberté Parlons-en" (sept. 2023) sur les luttes des femmes iraniennes, elle nous fait part de son analyse dans une tribune.
Un non historique du peuple ? Un référendum ? Une gifle pour le régime à la suite de l’élection (une mascarade organisée) ? Ou l’aboutissement du projet de Khamenei ? 1) Le Parlement : Après la révolution islamique de 1979, en 1980, quand la législature iranienne devient monocamérale, le « Madjles » (Assemblée consultative islamique) en est le seul corps législatif. Les sièges, au nombre de 290, sont pourvus pour quatre ans. Sur les 290, 285 sont pourvus au scrutin majoritaire à deux tours dans des circonscriptions comportant un ou plusieurs sièges en fonction de leur population. Les cinq sièges restants sont réservés et ont pour vocation à représenter les minorités confessionnelles reconnues à raison d'un siège chacun pour les Zoroastriens, les Juifs, les Chrétiens chaldéens et assyriens, les Arméniens du nord du pays et du sud. Le président actuel est Mohammad Ghalibaf qui est aussi membre du corps des gardiens de la révolution (CGRI ou IRGc). 2) L'Assemblée des Experts : Crée le 14 juillet 1983, elle est composée de 88 membres religieux élus pour huit ans au suffrage universel direct. Elle est chargée de nommer, de superviser et éventuellement de démettre le guide suprême. Avant les élections : Côté régime, tous les organes de l’état se sont mobilisés afin que les Iraniens aillent voter en masse et les encouragements du régime n’ont pas arrêté. Ali Khamenei, le guide suprême, n’a pas cessé de faire des déclarations au-delà de ses discours habituels les vendredis pour inviter les Iraniens à participer aux élections. Il disait que ne pas voter « amènerait de l’eau au moulin des ennemis du peuple iranien et de l’islam » et que « aller voter était mieux que de ne pas aller voter ». Le régime craignait : Un taux d’absentéisme record compte tenu ce qui se passe en Iran depuis 4 ans et plus particulièrement depuis 2 ans avec une situation économique gravissime, une inflation galopante (42.6% en juin 2023), une pauvreté croissante et enfin un traumatisme profond avec les crimes commis par le régime lors la révolution de #femmevieliberté, réveillant 45 ans d’humiliations. Pour Ali Khamenei, éviter une abstention forte suivait deux objectifs : montrer au niveau international que son régime dispose encore d’une légitimité et s’assurer de sa succession par son fils Mojtaba Khamenei. En effet, l’élection future d’un nouveau guide suprême par l’Assemblée des Experts à l’issue d’une faible participation rendrait sa succession illégitime aux yeux du peuple et au niveau international surtout s’il s’agissait de son fils. Compte tenu que, selon la constitution, le guide suprême est le haut responsable militaire et assure la présidence du judiciaire, il doit être un juriste possédant la plus haute autorité religieuse dans le chiisme duodécimain1. Il est aussi appelé Gardien de la jurisprudence. C’est lui qui désigne entre autres les hauts responsables militaires et la présidence du judiciaire. Selon la constitution iranienne, le guide doit être un marja taqlid2, juriste possédant la plus haute autorité religieuse dans le chiisme duodécimain. Il est élu par l'Assemblée des Experts, eux-mêmes élus au suffrage universel direct. Pour cela tout a été mis en œuvre pour prouver que Mojtaba Khamenei remplit les conditions pour être un marja afin que sa candidature soir présentable et qu’ensuite l’Assemblée des Experts émergeant du « Bureau du Guide Suprême » (le sérail) il l’élise ! Khamenei veut ainsi normaliser la question de sa succession par Mojtaba Khamenei avec un raisonnement par l’absurde. Par ailleurs, Ali Khamenei craint que si son fils ne lui succède pas, il risquerait de subir le même destin que le fils de Rouhollah Khomeiny, Ahmad.3 Les 88 membres de l’Assemblée des Experts (passés et présents), sont tous des représentants du Guide suprême. Leur statut d’Imam du vendredi des villes et leur situation sont entre les mains du sérail. S'ils veulent dire quelque chose contre l'opinion du sérail, ils perdent tous leurs avantages et leur rang en tant qu’Imam du vendredi. Ces grains de sable pourraient créer une brèche dans le dispositif de Khamenei : des élus, sensibles à de nouvelles vagues de protestations, pourraient devenir des contestataires, voire incontrôlables, ce qui contribuerait à un effondrement du régime. Pour l’éviter, il fallait que les candidats soient approuvés par les juristes du Conseil des Gardiens qui a validé seulement les candidatures parfaitement fidèles au le sérail d’où tout est piloté et où sont prises les décisions. Ebrahim Raïssi en faisait partie, donc son élection à l'Assemblée des Experts était une formalité car il était l’unique candidat accepté dans la province du Khorassan au Sud. C’est pourquoi c’est la première fois que l’organisation d’élections a été entièrement contrôlée depuis le ministère de l’Intérieur jusqu’aux bureaux de votes par le Corps des Gardiens de la Révolution Islamique. Pour éviter l’abstention, les soldats, les ouvriers, les prisonniers, les étudiants candidats à des concours, ont été contraints de se rendent aux urnes et pour la première fois un votant pouvait présenter comme pièce d’identité une des 5 pièces suivantes : acte de naissance, carte identité, passeport, permis de conduire ou carte de fin de service militaire pour les hommes. Ainsi, la porte a été laissée grande ouverte pour la fraude, une personne pouvait dans des bureaux de votes différents, voter 5 fois pour remplir les urnes, sachant qu’il n’existe pas de listes électorales. Côté du peuple : Malgré les dires du gouvernement qui répète que la participation aux élections n’était pas faible, la tendance de nombreuses personnes était de ne pas voter et de boycotter, pour différentes raisons : De nombreux Iraniens ne font plus confiance aux élections qu’ils ne considèrent pas comme de véritables élections, Les élections successives n’ont apporté aucune amélioration au niveau économique, social, sécuritaire, les gens s’appauvrissent de jour en jour et ce régime corrompu ne remédie en rien à leur situation, Voter, c’est contribuer aux crimes du régime. Plusieurs parents qui ont perdu leur jeune lors des manifestations en 2009, 2017, 2019, 2021 et 2022, plusieurs artistes etc … ont lancé un appel pour le boycott des élections, le message était clair : voter c’est mettre le doigt dans l’encre du sang des victimes. Le peuple n’attend plus rien des élections, l’affaire de la succession de Mojtaba ne les concerne pas, leur souhait est uniquement l’effondrement et la disparition pure et simple du régime. Les élections : Le jour des élections des dizaines de vidéos et de photos sont sorties d’Iran, montrant des rues vides, bien que le 20 mars prochain les Iraniens vont célébrer le nouvel an (Nowrouz) et traditionnellement les villes sont en effervescence pour la préparation de Nowrouz. Les vidéos montrent aussi des bureaux de vote vides alors que le régime faisait le jour même état d’une forte participation en utilisant des vidéos d’élections anciennes avec des queues des votants. Les gens sont restés chez eux et ont non seulement déserté les urnes mais aussi les rues.Alors qu’à 18h00, la fermeture des bureaux de vote était prévue, les Iraniens ont commencé à sortir de chez eux, ce qui a incité le régime à envoyer des messages d’encouragement à aller voter en prolongeant l’ouverture des bureaux de vote jusqu’à 20h puis jusqu’à 22h. Le résultat : Le régime avait prévu d’annoncer le jour des élections un taux de participation de l’ordre 61%, mais cela lui a dû sembler trop gros pour être cru, compte tenu justement de toutes ces vidéos. Il a finalement décidé de le revoir à la baisse et a déclaré que sur les 61 millions de votants, 25 millions avaient voté. Ce 1er Mars 2024 restera un jour historique de la victoire de la nation iranienne et une « gifle » pour Ali Khamenei. La légitimité de Mojtaba Khamenei n’est pas sortie des urnes. Néanmoins, Ali Khamenei a réussi à faire entrer les jeunes du clergé qu’il a placés dans des structures économiques importantes pour les « engraisser » afin qu’ils lui soient redevables. L’Assemblée de Experts devient ainsi une chambre d’enregistrement des consignes du Guide suprême ! Les votes nuls ont été les grands gagnants des élections. Dans certaines villes, leur nombre était supérieur au nombre de votes obtenus par le premier, le second ou le troisième candidat. Le premier candidat de Téhéran (avec un taux de participation de 24%) a obtenu trois fois moins de votes (597 770) par rapport aux candidats de la précédente élection. 18 des 30 candidats de Téhéran iront au second tour. Selon Euronews, dans la circonscription de la capitale, 400 000 votes, selon les statistiques officielles, n'ont pas été validées. Cela placerait le nombre de ces votes en deuxième position. Ce résultat conforte la conviction des Iraniens unanimes pour le rejet de ce régime : ceux qui ont été contraints d’aller voter ou ceux qui ont reçu éventuellement de l’argent pour aller voter. Une fois dans l’isoloir, ils ont envoyé un message clair au régime, à Ali Khamenei et à son fils Mojtaba. Les messages sur les bulletins de vote sont sans appel. Peu importe le pourcentage de votants, 61%, 41%…, peu importe combien des 290 sièges de l'assemblée, un second tour serait nécessaire et se tiendrait en avril ou en mai pour les candidats n'ayant pas obtenu un nombre suffisant de suffrages : les élections ne sont plus le problème des Iraniens. Les Iraniens ont tourné le dos au régime et aux élections. Ils espèrent faire tomber ce régime bien avant que des élections dignes de ce nom aient lieu sous l’égide d’instances internationales. Cela signifie que la somme de votes obtenue par des premiers candidats (2.8 millions) ne dépasse pas 4% par rapport aux 61 millions d'appelés à voter

Guerre en Ukraine : après deux années, que font les Occidentaux ?

par Nicolas Tenzer le 23 février 2024 Nicolas Tenzer
A la veille de « l’anniversaire » des deux ans de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, et dans un contexte marqué par des échéances électorales décisives, Nicolas Tenzer apporte son analyse du conflit et évoque le rôle des occidentaux. Il est enseignant à Sciences-Po Paris, non-resident senior fellow au Center for European Policy Analysis, blogueur sur les questions internationales et de sécurité sur Tenzer Strategics, et vient de publier "Notre Guerre. Le crime et l’oubli : pour une pensée stratégique" (Éditions de l’Observatoire, 2024).
Le Laboratoire de la République : Voilà deux ans que la Russie a envahi l’Ukraine. A la lumière des forces en présence et de la spécificité du conflit, doit-on s’attendre à un conflit de longue durée ? Nicolas Tenzer : Rappelons d’abord que, en réalité, cette guerre, devenue totale le 24 février 2022, dure depuis dix ans. Pendant longtemps, beaucoup ne voulaient pas la voir et les dirigeants n’en parlaient guère alors que, avant 2022, elle avait déjà fait 14 000 victimes et 1,6 million de déplacés. A l’époque, lorsque je disais que la guerre faisait rage à 3 heures d’avion de Paris, beaucoup me regardaient interloqués. Donc le conflit de longue durée que vous évoquez, il est en fait déjà là. Va-t-il encore continuer longtemps ? Je répondrais comme le président Zelensky l’a fait récemment à la Conférence de Munich sur la sécurité : « Ne demandez pas aux Ukrainiens quand la guerre va se terminer. Demandez-vous (Occidentaux) pourquoi Poutine est encore capable de la poursuivre ». Cette phrase rappelle trois réalités. La première est que la guerre serait déjà achevée par la victoire de l’Ukraine si les Occidentaux l’avaient déjà voulu. Nous avions la possibilité d’arrêter les massacres commis par Moscou mais nous, Alliés, n’en avons pas décidé ainsi. Ensuite, le péché capital, qui vaut culpabilité, ayant consister à laisser des dizaines d’Ukrainiens se faire assassiner est uniquement le nôtre. Enfin, cette phrase est indicatrice de la suite des temps. Ce qui va advenir dans les mois qui viennent dépend de notre volonté de donner toutes les armes possibles, sans limitation en termes de spécificité (portée des missiles, avions de chasse) pour permettre à l’Ukraine de gagner et à la Russie d’être défaite. Si nous prenons conscience de cette nécessité, il n’est, pour les nations européennes, d’autre choix que de passer réellement en économie de guerre. Les Ukrainiens ont démontré leur incroyable faculté d’innovation sur le plan technologique. Cela m’a encore frappé chaque fois que je suis retourné en Ukraine depuis le début de cette guerre totale. Elle a quand même réussi à détruire 20 % de la flotte russe en Mer Noire et à menacer la Crimée. Un de mes amis, ancien ministre ukrainien, me prédisait déjà en septembre 2022 que la Crimée pourrait être récupérée avant le Donbass. Quand, à mon tour, j’évoquais cela dans plusieurs émissions, beaucoup se montraient sceptiques. C’est progressivement en train de se réaliser. Si la Russie a certes trois fois plus de soldats à mobiliser que l’Ukraine, l’absence de souci de la part de Poutine pour ses soldats fait qu’ils meurent en plus grand nombre dans des batailles inutiles. Avec toutes les armes occidentales, l’Ukraine pourrait frapper en profondeur les forces ennemies, y compris sur le territoire russe – ce qui est légal en vertu de l’article 51 de la Charte des Nations unies – et obliger Moscou au reflux. Tous les experts sérieux disent que, si nous le voulons, Kyïv peut l’emporter d’ici la fin de l’année. Le Laboratoire de la République : Quelle est votre analyse de l’impact des élections américaines sur la mobilisation occidentale en faveur de l’Ukraine ? Nicolas Tenzer : La possibilité d’une victoire de Trump en novembre, qui n’est pas une découverte récente, a eu un effet de remobilisation des pays européens sur le plan militaire. Leurs dirigeants ont été saisis comme d’un vertige, car ils savent que, sans les États-Unis, non seulement l’Ukraine aurait pu ne pas survivre aux assauts russes, quand bien même cette aide américaine reste insuffisante, mais que les pays européens ne seraient pas à même d’utiliser leur propre défense conventionnelle pour résister aux attaques russes contre l’un des leurs. Ils ont pris conscience que, pour assurer eux-même cette défense, ils devront passer rapidement bien au-delà des 2 % du PIB, norme minimale fixée par l’OTAN et que la France n’atteindra que cette année. Si l’on devait, de plus, remplacer le parapluie nucléaire américain, ce chiffre devrait même être triplé. Mais c’est prioritairement nos forces conventionnelles que nous devons renforcer de manière drastique. Pour ne citer qu’un chiffre, le budget de défense de l’UE représente aujourd’hui un tiers du budget américain, alors que la taille de notre population est supérieure. Autrement dit, nous devons nous mettre en état non seulement d’assurer notre propre défense territoriale au niveau européen, mais également être capables d’intervenir alors même que Washington ne le voudrait pas. La question pourrait d’ailleurs se poser concrètement pour l’Ukraine en cas de victoire électorale de Trump. Or, là aussi, le problème n’est pas entièrement nouveau : rappelons-nous que François Hollande, en 2013, était prêt à frapper les centres de commandement du régime criminel syrien après les attaques chimiques contre la Ghouta, mais a dû y renoncer après qu’Obama ait refusé de faire respecter la ligne rouge qu’il avait lui-même déterminée et que la Chambre des Communes britanniques l’a aussi exclu. Notons que cette décision du président américain a été comme un signal donné à Poutine qu’il avait les mains libres. 2014 en découle logiquement. Le Laboratoire de la République : En cette année des élections européennes, quel rôle peut et doit jouer l’Europe pour influer sur l’issue du conflit ? Nicolas Tenzer : L’Europe doit prendre la tête dans le combat le plus résolu pour qu’une action décisive soit engagée en Ukraine, sinon elle perdra toute légitimité et toute crédibilité. Comme souvent, nos impératif en termes de valeurs et de sécurité se rejoignent. Abandonner l’Ukraine ou chercher lâchement à négocier avec Poutine serait d’abord trahir nos principes, et notamment notre obligation de faire respecter le droit international. Cela a toujours été au cœur de la vocation européenne, beaucoup plus, reconnaissons-le, qu’américaine. Une telle trahison de la cause ukrainienne serait d’autant plus dramatique que, à Maidan déjà, l’Ukraine a chassé son dictateur pro-russe Viktor Ianoukovitch, au nom des valeurs européennes et que, aujourd’hui, ses combattants meurent pour nous aux avant-postes d’une guerre européenne que nous leur avons honteusement déléguée. En 2015, l’ancien ministre tchèque des Affaires étrangères, Karel Schwarzenberg, disparu l’année dernière, déclarait que le destin de l’Europe se jouerait en Ukraine. Car si l’Ukraine tombe, si Poutine ne connaît ne serait-ce qu’une demi-victoire, c’est ensuite l’Union européenne qui sera attaquée. L’Ukraine est la dernière sur la liste avant nous dans ce qui serait une liste actualisée de nos indifférences telle que le Pasteur Martin Niemöller l’avait jadis formulée. Après avoir laissé se faire massacrer les Tchétchènes, les Géorgiens et les Syriens, sans les Ukrainiens nous n’aurons plus personne pour nous défendre. J’espère que la France pourra prendre la tête de ce combat européen pour l’Ukraine et faire comprendre à ses citoyens comme à tous ceux de l’Europe que cette guerre est la nôtre et qu’elle requiert, car elle est totale, une mobilisation de même nature. Devant un ennemi radical dans le crime et la volonté de destruction, nous devons apprendre à penser, puis à agir, radicalement. Soyons directs : je ne suis pas sûr qu’un jour nous n’ayons pas nous-mêmes à livrer cette guerre. Ayons l’intelligence de le regarder en face et de nous y préparer.

Israël-Palestine : L’Europe face à la guerre au Proche-Orient

par Yasmina Asrarguis le 21 février 2024
Cette étude réalisée par Yasmina Asrarguis, chercheure-spécialiste de géopolitique du Moyen-Orient, analyse un total de 1 284 publications originales sur la plateforme sociale X, publiées par les dirigeants européens Charles Michel, Emmanuel Macron, Josep Borrell, Olaf Scholz, Roberta Metsola et Ursula Von der Leyen entre le 6 octobre 2023 et le 24 janvier 2024. Bien que les 27 pays s'accordent sur la nécessité de relancer les pourparlers en vue d'une solution à deux États, la stratégie diplomatique de l'UE peine à convaincre les parties prenantes de la faisabilité d'une conférence de paix en Europe. Pour l’heure, la nécessité est aux efforts diplomatiques continus et persistants auprès des acteurs régionaux, cela permettra à l’Europe de gagner en crédibilité en tant que médiateur et de porter sa voix lors des pourparlers entre Israéliens, Palestiniens et pays arabes.
Fin janvier 2024, les tractations à Paris entre les services de renseignements israéliens, américains, qataris et égyptiens ont permis de négocier les termes d’une possible trêve des combats ainsi que la libération d’otages israéliens détenus par le Hamas et le Jihad islamique. Le choix de Paris dans le cadre de cette nouvelle phase de négociations est à saluer, bien que le retour de l’Europe dans les négociations de paix, entre Israéliens et Palestiniens, demeure timide et limité à la médiation avec le Hezbollah. Alors que la France s’apprête à accueillir, dans les prochains jours, l’émir du Qatar en visite officielle, nous analysons ici le positionnement diplomatique des décideurs européens ainsi que leurs discours politiques depuis le massacre du 7 octobre 2023. GUERRE ISRAEL-HAMAS: RETOUR DE L’EUROPE DES DEUX BLOCS Face à la guerre Israël-Hamas à Gaza, les dirigeants européens ont d’abord condamné le massacre et les crimes commis contre les civils israéliens, avant d’emboîter le pas de la diplomatie onusienne en appelant au cessez-le-feu humanitaire et à la reprise des négociations diplomatiques. La division même de l’Europe en deux blocs est apparue comme indéniable dès le 10 octobre dernier à l’Assemblée générale des Nations Unies, lors de l’adoption en session d’urgence d’une résolution jordanienne en matière de protection des civils et de respect des obligations juridiques et humanitaires à Gaza :  en phase de négociation, certains pays européens ont vivement critiqué l'absence de formulation concernant le massacre d'Israéliens et la nécessité de libérer tous les otages israéliens détenus par le Hamas. Vote des Européens à la résolution onusienne appelant à une "trêve humanitaire" immédiate et durable (27/10/2023)   Yasmina Asrarguis Défendue publiquement par l'Iran, cette résolution fut votée par une large majorité d’États membres de l'ONU, avec 120 voix en faveur de la résolution, 14 contre et 45 abstentions. Au sein de l’Union Européenne, huit pays votèrent en sa faveur : l’Espagne, le Portugal, Malte, la Belgique, le Luxembourg, l’Irlande, la Slovénie, et la France, contre quatre pays qui s’y opposèrent : l’Autriche, la République Tchèque, la Croatie, et la Hongrie. Enfin, quinze pays européens ont fait le choix de l’abstention : la Bulgarie, Chypre, le Danemark, l’Estonie, la Finlande, l’Allemagne, la Grèce, l’Italie, Lettonie, Lituanie, Pays-Bas, Pologne, Roumanie, Suède, et la Slovaquie. Pour rappel, ce vote intervient quelques jours après que le Conseil de sécurité ait échoué, en quatre sessions, à parvenir à un quelconque accord et consensus sur la situation au Moyen-Orient. Le grand fossé qui sépare l'Europe de l'Ouest de l'Europe de l'Est témoigne des frontières idéologiques qui prévalent au sein de l'Union européenne : le positionnement diplomatique en matière de paix au Moyen-Orient n'échappe pas aux facteurs endogènes que sont l'histoire nationale, la démographie et les alliances avec les grandes puissances. Ces éléments structurels ont façonné les relations des États membres de l'UE avec les Israéliens et les Palestiniens, mais aussi leur volonté de s'engager ou de se désengager de la région en temps de guerre. GUERRE DU SOUCCOT : ANALYSE DES PRISES DE PAROLES POLITIQUES a. La France, premier pays d’Europe, à s’exprimer sur le conflit Entre le 6 octobre 2023 et le 24 janvier 2024, nous avons analysé un total de 1284 publications sur la plateforme sociale X, postées par les principaux décideurs européens dont Charles Michel, Emmanuel Macron, Josep Borrell, Olaf Scholz, Roberta Metsola et Ursula Von der Leyen. Au cours de nos recherches, nous avons constaté des différences fondamentales dans la manière dont les dirigeants européens s’expriment sur ce dossier, à commencer par le nombre de publications qu'ils ont consacré à la guerre en Israël-Palestine. Depuis le 7-Octobre, près d'un quart (22 %) des expressions publiques des leaders européens mentionnent le conflit en Israël-Palestine, à l’exception des publications de Roberta Metsola qui ne mentionne nullement le « conflit ».  En revanche, environ un tiers (31 %) des publications de Josep Borrell mentionnent le conflit israélo-palestinien ou les parties belligérantes, suivi par Olaf Scholz (28 %), Emmanuel Macron (26 %), Ursula Von der Leyen (19 %) et Charles Michel (14 %). Josep Borrell a, du fait de sa fonction, publié le plus grand nombre de tweets sur le conflit en chiffres absolus (96 au cours de la période observée), ce qui représente un tiers de toutes les publications faites par les dirigeants de l'UE. Il est suivi par Emmanuel Macron (71 publications), Olaf Scholz (50), Ursula Von der Leyen (47) et Charles Michel (24). Nous avons ensuite segmenté les publications et analysé le contenu de ces expressions publiques, qui dans leur grande majorité tente à réaffirmer les objectifs de court-terme des dirigeants européens : désescalade, respect du droit humanitaire, protection des civils, et libération des otages. Expressions politiques des européens sur le conflit Israël-Hamas, en nombre de publications Twitter  (6 octobre 2023 au 24 janvier 2024)  Yasmina Asrarguis b. Evolution de l’expression politique avec la guerre Dans les premières semaines qui ont suivi l’attaque terroriste du Hamas dans les kibboutzim et au festival Tribe of Nova, les dirigeants européens se sont empressés de condamner publiquement les massacres et de les qualifier d'actes terroristes, réclamant par ailleurs la libération des otages israéliens. Six semaines après le          7 -Octobre, les leaders européens ont cessé de mentionner explicitement la barbarie et le terrorisme du Hamas, tout en réclamant la libération des otages israéliens. Au premier jour de l’opération Déluge d’al-Aqsa, riposte israélienne à Gaza, les Européens ont subitement changé de discours politique en insistant dorénavant sur l’importance de la protection des civils et de la mise en place de couloirs humanitaires. À mesure que le conflit évolue depuis novembre 2023, nous constatons que les décideurs européens persévèrent dans leur appel commun à la désescalade, tout en insistant sur l’importance du solution politique à deux États.    Yasmina Asrarguis A ce jour, la crise humanitaire reste l’enjeu principal de prise de parole européenne et la question de la résolution politique du conflit n’a véritablement gagné du terrain que six semaines après le début des hostilités sans que cela ne fasse l’objet d’une grande vision ou stratégie pour la paix. Comme en témoigne le graphique ci-dessous, la chute drastique du nombre de publications sur la guerre Israël-Hamas à partir de décembre 2023 (semaine 8) témoigne d’un progressif retrait ou travail à la marge des décideurs européens. Il est à noter qu’il n’y a eu aucun déplacement majeur de leader Européen en Israel-Palestine en 2024, à la différence du secrétaire d’Etat américain en visite officiel à Jérusalem le 7 février dernier.  Armer la diplomatie européenne d’ambition L’UE doit statuer sur le niveau d’incitation économique et politique qu'elle souhaite mettre sur la table afin de décourager l'escalade en Israël-Palestine. Les dirigeants de l'UE ont publiquement déclaré qu'ils étaient prêts à soutenir toute forme de processus de paix conduisant à une solution à des deux États. Cette position de facilitateur doit maintenant être renforcée par une initiative pragmatique ou des pourparlers secrets qui ouvriraient la voie à une conférence de paix plus large. Alors que la guerre Israël-Hamas fait rage, l’Europe peut contribuer à un effort de stabilisation grâce à trois principaux leviers d’action. Premièrement, les États membres de l'UE doivent investir en capital politique auprès des acteurs régionaux de confiance, et dont la capacité de médiation et de stabilisation est avérée. Deuxièmement, les dirigeants de l'UE se doivent d’être plus visibles, proactifs et présents sur le terrain lors des sommets et forums régionaux au cours desquels la paix au Moyen-Orient est débattue. Enfin, l'aversion de l'Europe à la guerre au Proche-Orient doit être mise au service d’une nouvelle ambition diplomatique et stratégique permettant de relancer le dialogue politique entre Jérusalem et Ramallah, mais également de positionner l’Europe sur le plan régional.

Soft Power et alliances des Etats arabes du Golfe : jusqu’où ira la quête d’influence ?

par Frédéric Charillon le 19 décembre 2023 Trois dirigeants des Etas arabes du Golfe
La coupe du monde de football au Qatar, la médiation par le Qatar de la libération des otages détenus par le Hamas, la COP 28 à Dubaï ou encore l'exposition universelle de 2030 à Riyad nous questionnent sur le jeu d'influence qu'exerce cette région du Moyen-Orient. Alors que les préoccupations relatives aux droits de l'homme et aux risques écologiques ont été soulevées, la quête d'influence de l’Arabie saoudite, des Emirats arabes unis et du Qatar s'accroit de plus en plus. Eclaircissement sur la situation avec Frédéric Charillon, professeur de science politique à l’Université Paris Cité et à l’ESSEC, ancien directeur de l'institut de recherche stratégique de l'Ecole militaire (IRSEM), et auteur de « Guerres d’influence » (Odile Jacob, 2022).
Le Laboratoire de la République : En quoi la diplomatie et le soft power jouent-ils un rôle crucial dans la quête d'influence de l’Arabie saoudite, des Emirats arabes unis et du Qatar dans les relations internationales ? Y a-t-il des exemples concrets qui illustrent leur utilisation efficace ? Frédéric Charillon : Les pays du Golfe ont tenté de mettre au point depuis plusieurs années une stratégie de communication qui vise essentiellement à les présenter non plus comme de seuls producteurs énergétiques et exportateurs de réseaux religieux, mais également comme des pays d'avenir, dotés d'une sensibilité intellectuelle et d’un sens moderne des responsabilités internationales. Plusieurs raisons à cela : d'abord, l'impératif pour eux de dissiper l'image de l'émir arrogant tel qu'elle est généralement perçue dans les pays arabes non pétroliers. On se souvient de la profonde division du monde arabe lorsque le Koweït fut envahi par l'Irak le 2 août 1990 : une moitié de la Ligue arabe avait refusé de condamner l'invasion du pays par les troupes de Saddam Hussein, avec un plaisir parfois non dissimulé à voir le riche petit état pétrolier prendre une leçon. Deuxièmement, la rente énergétique s'épuise dans certains pays, mais surtout, même lorsque les réserves restent importantes, la dépendance aux exportations pétrolières ou gazières, trop forte, nécessite une diversification des recettes. Une entrée plus forte dans le monde et dans la diversification de l'économie mondiale est donc devenue nécessaire pour les riches états pétroliers. Ce qui suppose des partenariats nouveaux, des clients, des terrains d'investissement et donc une image meilleure pour les obtenir. Les pays du Golfe sont conscients de leur mauvaise image aussi bien dans le monde occidental que dans une grande partie du monde arabe. Comme on l'a dit, ils sont souvent perçus comme arrogants, insensibles aux souffrances des autres pays du Sud, mais également accusés par l'Occident de soutenir et de financer des réseaux religieux radicaux. Une révolution de leur « nation branding » et une campagne de communication s'imposaient donc. Plusieurs stratégies ont dès lors été développées. La première a consisté à donner des preuves d'intérêts intellectuel, culturel, artistique, dans le monde. La chaîne d'information qatarie Al-Jazeera propose depuis 1996 des émissions d'information avec une liberté de ton que l'on n'avait pas coutume de voir dans cette région (même si l'émirat a pris soin de réserver cette nouveauté à l'exportation et non pas à sa propre population). Le même Qatar a fourni un effort important pour investir dans des clubs de sport, des événements ou des chaînes sportives, mais aussi du mécénat artistique, ou pour diversifier ses investissements dans de nombreux secteurs internationaux. Le tourisme a également été privilégié, pour inciter le grand public international à venir découvrir sur place des pays que l'on présentait sous un jour négatif. Ainsi Dubaï, aux Émirats, est devenu un hub touristique de premier ordre. L'Arabie saoudite tente également de développer le même secteur, avec des projets comme al Ula ou le projet plus futuriste de la ville connectée de Neom. Les dirigeants de ces pays, aujourd'hui plus jeunes (à l'image du prince héritier saoudien MBS), cherchent également à donner une autre vision de ces royaumes autrefois considérés comme conservateurs et archaïques. Quels sont les résultats de ces efforts ? Il est difficile de le mesurer. Les polémiques restent nombreuses lorsqu'on évoque ces pays. Pour autant un certain succès de leur modèle économique, leurs évolutions sociales, sont observés et admis. Un certain scepticisme règne encore sur la réalité de leur volonté de changement, qu'il leur appartiendra de dissiper dans les prochaines années. Le Laboratoire de la République : Quelles alliances et quels partenariats clés ont été formés par ces pays pour renforcer leur influence, en particulier dans le contexte géopolitique actuel ? et la France dans tout cela ? Frédéric Charillon : On note depuis plusieurs années quelques évolutions importantes. La première est un éloignement subtil et incomplet, mais croissant, à l'égard de leur allié américain traditionnel, pour se rapprocher d'une dynamique sud-sud, notamment un rapprochement avec le groupe des BRICS. Les pays du Golfe se souviennent ainsi qu'ils sont une fenêtre sur l'océan indien et dès lors sur l'Asie. Leur entrée de plain-pied dans l'économie mondialisée à partir du nouveau moteur de cette dynamique internationale que constitue l'Asie, se fait naturellement. Paradoxalement, une deuxième évolution se fait jour avec la normalisation des relations de certains pays avec l'Etat d'Israël. Ce rapprochement n'est pas sans poser des problèmes. D’abord, il divise. Il a été effectif et assumé de la part des Émirats arabes unis, qui envisageaient positivement des coopérations technologiques et économiques avec l’Etat hébreu. L'Arabie saoudite laissait planer un doute sur ses intentions de rejoindre le mouvement, mais la participation de Bahreïn (petit Etat très proche de Riyad) aux accords d'Abraham fin 2020 était le signal que le Royaume d'Arabie saoudite ne s'opposait pas fondamentalement à une telle dynamique. Mais pour le moment le Qatar refuse d’entrer dans la danse. Par ailleurs, les événements du 7 octobre en Israël et la guerre consécutive à Gaza, gèle pour le moment tout rapprochement public possible entre Israël et les Etats arabes du Golfe. Enfin un dialogue nouveau semble s'établir avec l'Iran, sous l'égide de Pékin. Un rapprochement durable du régime de Téhéran avec les Etats du Golfe constituerait une nouvelle donne importante dans la région, Même s'il est aujourd'hui loin d'être acquis. Dans ce contexte, la France constitue un partenaire secondaire mais qui peut trouver une place importante par moments. D'un président à l'autre, le Qatar ou les Émirats arabes unis ont constitué des partenaires privilégiés pour Paris. Des partenaires économiques, commerciaux, mais parfois également politiques, à l'image de Doha qui s'est fait une spécialité de négociation internationale sur des dossiers difficiles. L'évacuation des Occidentaux d'Afghanistan après l'annonce du retrait américain à l'été 2021 a été ainsi grandement aidée par l'entremise qatarienne. Pour autant soyons clairs : ce n'est pas prioritairement vers Paris que les Etats du Golfe se tournent aujourd'hui pour leur avenir géopolitique. Et ce, même si les partenariats sont loin d'être négligeables : Sorbonne Abu Dhabi, Louvre Abu Dhabi... Le Laboratoire de la République : Le 10 décembre 2023, nous avons fêté le 75ème anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Les préoccupations relatives aux droits humains ont été soulevées à l'égard de ces pays. Ces préoccupations peuvent-elles affecter leur image internationale et échanges commerciaux ? Frédéric Charillon : Oui. Des militants des droits de l'homme continuent de protester contre l'établissement de liens plus solides avec ces pays du Golfe, qui restent des monarchies absolues ou tout au moins des régimes autoritaires. Une autre résistance à l'établissement de meilleures relations vient d'acteurs occidentaux conservateurs, qui condamnent le rôle de ces états dans un certain nombre de réseaux religieux radicaux. On doit constater néanmoins que ces protestations d'ordres différents existent depuis longtemps et qu'elles n'ont jamais réellement affecté les relations politiques, économiques et commerciales entre les pays occidentaux et ces pays du Golfe. Mais l'exigence à leur égard est de plus en plus forte à mesure que ces pays eux-mêmes se présentent désormais comme réformateurs. Les droits humains, notamment les droits des femmes, seront scrutés de plus en plus attentivement. Des manquements à cet égard auront des répercussions de plus en plus fortes sur les relations diplomatiques. Le Laboratoire de la République : Quels scénarios possibles envisagez vous pour l'influence future de cette région du Moyen-Orient, et comment elle pourrait façonner les relations internationales dans les années à venir ? Frédéric Charillon : Plusieurs questions importantes se font jour aujourd'hui. La première est liée à la situation immédiate dans la bande de Gaza. Le conflit actuel mettra-t-il fin à la normalisation des relations entre Israël et les Etats du Golfe ? Autre interrogation  : Les Etats du Golfe continueront-ils de s'éloigner de leurs alliés occidentaux pour se rapprocher imperceptiblement d'un agenda politique soutenu par Moscou ou Pékin ? L'excellent accueil réservé à Vladimir Poutine à Abu Dhabi et à Riyad il y a quelques jours pose question à l'heure de la guerre ukrainienne. Si l'on peut comprendre que ces pays gagnent en autonomie diplomatique vis-à-vis de leur ancien mentor américain, un éloignement trop ostentatoire poserait problème. D'autres questions multiples surgissent aussi. Que se passerait-il en cas de retour de Donald Trump à la Maison Blanche ? Comment réagiraient les différents Etats du Golfe et quelles seraient leurs relations avec cette future Amérique ? L'Europe les intéresse-t-elle toujours ? Les Etats du Golfe accepteront-ils de jouer un rôle majeur dans les transitions environnementales ou bien rejoindraient-il le camp climato-sceptique d'un Donald Trump ? Eux-mêmes garderont ils leurs unités au sein du Conseil de coopération du Golfe, ou vont-ils se diviser à nouveau comme on l'a vu entre le Qatar et ses voisins en 2017 ? Les Émirats arabes unis et l'Arabie saoudite resteront-ils aussi proches, ou finiront-ils par devenir rivaux ? Quel est l'avenir du Qatar, qui héberge des chefs politiques du Hamas, après la guerre actuelle d'Israël dans la bande de Gaza  ? Autant d'incertitudes qui pèseront sur le rôle à venir de la région du Golfe dans les relations internationales.

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